Transsibérien finale

Nous remontons une dernière fois dans le transsibérien, mais pas des moindres, pour 3 jours de train, 4200kms de voie ferrée jusqu'à Vladivostok. Pour ce trajet nous avons fait le plein de provisions : une miche de pain noir, un saucisson, 300g de fromage, une conserve de cornichons salés, 427g de biscuits secs (car tout est au poids ici), quelques pommes et poires, des friandises, 2 cannettes de bière pour Julien, 1l de jus de fraise des bois et 50cl de vodka pour Mylène. Le train part d'Irkoutsk à 9h du soir et longe donc les belles côtes du Baikal malheureusement de nuit, on le devine quand même grâce au reflet de la lune.

Le lendemain le train se réveille en plein millieu de la siberie. On longe une rivière sur une centaine de kilomètres puis une autre, au milieu des collines timidement boisées des troncs blancs des bouleaux et de pins rouges. C'est ici que se termine la steppe russe et que commence la taïga. Les immenses paysages vides sont ponctués de petits villages d'izby (maison sibérienne en bois) souvent autour d'une usine abandonnée, d'où s'échappent de vieux side-cars oural et quelques ladas.

Le train s'arrête plusieurs fois par jour dans des gares aux noms inconnus, monuments d'architecture soviétique. A quai les passagers se jettent sur les boutiques d'appoint - on trouve de tout jusqu'aux oeufs de saumon - ou sortent se dégourdir les jambes sous les yeux attentifs des provonista. On retrouve les hommes en slip. Des agents de maintenance vérifient les boogies en tapotant méthodiquement dessus avec un bâton pour vérifier qu'elles ne tombent pas. Des policiers passent en revue le train coiffés de leurs immenses casquettes.

A bord la vie est paisible. Une vieille dame dans le compartiment voisin écoute de la variété russe. Une marchande passe régulièrement dans les couloirs avec son caddie vendre des pirojki (petits pains fourrés à la pomme de terre ou aux choux) et friandises. On s'occupe en lisant Guerre et Paix ou Anna Karénine pour ne pas trop s'éloigner du thème, on grignote nos provisions, on fait la sieste et surtout on admire les paysages de Sibérie.

Le deuxième jour le train longe doucement la frontière chinoise, dessinée par la rivière Amour. Ce sont de longues traversées de forêt, avec inlassablement les deux mêmes arbres trapus. Le ciel est gris, quand la lumière tombe les bois prennent un air sombre et menaçant.

Aujourd'hui le train ne s'arrête que deux fois. Les villes rompent la monotonie du paysage et deviennent une attraction. La première ville, au point culminant de toute la ligne transsibérienne est une des villes les plus froide au monde où la température peut descendre certains hivers à -62°C. La seconde accueille la construction de la nouvelle zone de lancement qui remplacera Baikonour dans les années à venir.

Le troisième et dernier jour le train traverse un paysage tout à fait différent : l'Ussuri, un mélange de marécages et de forêts tropicales (la plus au nord du glode si si), le territoire du tigre de Sibérie. L'air est d'ailleurs devenu bien plus chaud et humide. Il est tant d'arriver, la voiture commence à sentir fortement le poisson sèché, et notre voisin de compartiment ne dessaoule plus.

A la nuit tombante le train atteint enfin la mer du Japon. Il s'enfonce dans le brouillard marin, on voit apparaitre les ébauches d'une grande ville, quelques usines, des tours de béton... Le train arrive enfin, après 9288 kilomètres et 7 fuseaux horraires traversés depuis Moscou à Vladivostok (photo 9), acceuilli sur le parvis par une glorieuse statue de Lenine.